Par Anne-Sophie Gingras, Audrey Brassard, Katherine Péloquin, Marie-France Lafontaine, Anne Brault-Labbé et Patrick Gosselin
L’article, intitulé « Anxiety and depressive symptoms in first-time parents: A dyadic longitudinal study based on attachment theory » et publié dans le Journal of Affective Disorders par Anne-Sophie Gingras et ses collaborateurs, se penche sur l’examen des liens temporels et dyadiques entre l’anxiété et la dépression chez les nouveaux parents, en mettant en lumière comment les insécurités d’attachement prénatales peuvent influencer ces symptômes anxieux et dépressifs après la naissance de l’enfant. Cette recherche vise à mieux comprendre les facteurs qui contribuent au bien-être psychologique des couples pendant cette période de transition significative, en soulignant l’importance d’une approche dyadique considérant les interrelations entre les partenaires.
Principaux constats
Les principaux résultats de l’étude révèlent que :
- L’anxiété et la dépression prénatales prédisent les symptômes postnataux : les individus qui présentent des niveaux élevés d’anxiété et de dépression pendant la grossesse sont plus susceptibles de continuer à éprouver ces symptômes après la naissance de l’enfant.
- L’anxiété liée à l’attachement prénatal est associée à des niveaux plus élevés d’anxiété et de dépression postnatales: les individus qui se sentent insécures dans leurs relations intimes avant la naissance de l’enfant sont plus à risque de développer des symptômes anxieux et dépressifs après la naissance.
- L’évitement lié à l’attachement prénatal est lié à des symptômes dépressifs postnataux: les individus qui ont tendance à éviter l’intimité et l’engagement émotionnel sont plus susceptibles de développer des symptômes dépressifs après la naissance de l’enfant.
- Les partenaires avec des niveaux plus élevés d’anxiété liée à l’attachement prénatal présentent davantage de symptômes anxieux et dépressifs: il a été constaté que les symptômes dépressifs prénataux du partenaire jouent un rôle de médiateur dans cette association, soulignant l’importance des dynamiques dyadiques.
- Aucune différence significative liée au genre n’a été observée: les relations entre les variables étudiées étaient similaires chez les mères et les pères.
Conclusion
Cette étude souligne l’importance cruciale de dépister l’anxiété et la dépression chez les deux parents pendant la grossesse et jusqu’à un an après l’accouchement. Il est également important d’adresser les insécurités liées à l’attachement pour prévenir les symptômes futurs et favoriser le bien-être psychologique des couples qui traversent la transition vers la parentalité. Les professionnels de la santé devraient tenir compte de ces résultats et proposer des interventions ciblées pour soutenir les couples à risque. Enfin, l’étude met en lumière l’importance de considérer ces symptômes, même s’ils ne sont pas au niveau clinique, soulignant que même des niveaux plus faibles de détresse peuvent avoir un impact significatif sur le bien-être des parents. L’article a été publié le 15 juin 2024.
Informations supplémentaires sur la méthodologie
L’étude est motivée par la reconnaissance que la transition vers la parentalité (TTP) est une période de stress intense pour les couples, associée à de nouveaux rôles et responsabilités, ce qui peut engendrer des symptômes d’anxiété et de dépression. Bien que de nombreuses études aient exploré ces symptômes chez les mères, il y a un besoin croissant de considérer également l’expérience des pères et d’examiner les dynamiques dyadiques. L’étude s’appuie sur la théorie de l’attachement, qui suggère que les relations précoces influencent la façon dont les individus gèrent le stress et cherchent du soutien dans les relations ultérieures.
Pour atteindre ses objectifs, l’équipe de recherche a suivi un échantillon de 211 couples français-canadiens attendant leur premier enfant. Les participants ont été recrutés entre mars 2019 et septembre 2020, et ont été évalués à trois reprises: pendant le deuxième trimestre de la grossesse ainsi qu’à 4 et 12 mois après la naissance de l’enfant. Lors de chaque évaluation, les participants ont rempli des questionnaires visant à évaluer différents aspects de leur bien-être psychologique, notamment:
- L’anxiété : mesurée à l’aide du State-Trait Inventory for Cognitive and Somatic Anxiety (STICSA).
- La dépression : évaluée à l’aide de l’Edinburgh Postnatal Depression Scale (EPDS).
- Les insécurités liées à l’attachement : évaluées à l’aide de la version abrégée à 12 items de l’Experiences in Close Relationships (ECR-12).
Les analyses ont utilisé des modèles statistiques avancés, notamment des modèles autorégressifs croisés, pour examiner les relations temporelles entre les variables et tenir compte des interdépendances entre les partenaires.
Ressources supplémentaires
Outil de promotion en santé mentale périnatale
Guide de bonnes pratiques pour l’implication des proches en santé mentale
Toi, Moi, Bébé, une plateforme pour l’accompagnement des futures et jeunes mères